« Cinéma en lutte »
Le cinéma en lutte c’est avant tout un cinéma politique qui défend une cause. Les films, réalisés collectivement ou individuellement, accompagnent et participent aux révolutions, mouvements de protestation et dynamiques de transformation. En tournant des images, en enregistrant des sons, ou en se réappropriant des archives, les cinéastes contribuent à l’invention de nouvelles formes esthétiques. Convaincus de la nécessité du changement, leurs objectifs varient selon les contextes historiques : réveiller les consciences, expliquer les événements, dénoncer des injustices, mais aussi, créer un cinéma de décolonisation, un cinéma en marge et contre le système dominant.
Les films retenus pour cette saison nous montrent différentes formes d’engagement et de lutte dans l’espace et le temps. L’Amérique latine, précurseuse du cinéma révolutionnaire dans les années 1960 – 1970, est mise à l’honneur pour l’ouverture en octobre, avec le court-métrage Now! de Santiago Alvarez. Cet hommage au mouvement du “ Troisième cinéma ” fait écho au film algérien, Fragments de Rêves de Bahïa Bencheikh El Fegoun, longtemps censuré, qui explore les mouvements de contestation depuis 2011 et avant le Hirak. La séance de novembre est consacrée au cinéma palestinien avec Your Father Was Born 100 Years Old, and So Was the Nakba de Razan Al Salah et Recollection de Kamal Aljafari. Dans les deux films, la création artistique permet de retourner, par les images, en Palestine, et de résister à la colonisation qui passe notamment par la dépossession du territoire. Enfin, dans le cadre de l’atelier programmateur, au Polygone Étoilé, les participants choisissent le film de décembre. Ils découvriront des films auto-produits, écrits dans l’exil ou sur le front, de façon collective ou anonyme, qui donnent la parole aux sans-voix.
L’ensemble du cycle a été pensé en partenariat avec les Rencontres Cinématographiques de Béjaia. En lien avec notre thématique, ce festival offre un espace pour penser l’engagement dans le cinéma, et surtout, pour que le cinéma en lutte puisse exister, circuler et être montré.
Les Rencontres Cinématographiques de Béjaia
L’association Project’heurts organise depuis 2002 les Rencontres Cinématographiques de Béjaia, manifestation culturelle qui oeuvre à la rencontre entre le public algérien et des cinéastes du monde entier. Depuis 2015, a été mis en place le Béjaia Film Laboratoire (BFL) afin de soutenir les jeunes talents émergents des pays du Maghreb : Maroc, Algérie, Tunisie.
Jeudi 15 octobre 2020 – 9h30 à La Baleine*, 20h30 au Vidéodrome 2**
Now ! de Santiago Alvarez
Cuba / 1965 / 6 min
Synopsis : Un des plus grands classiques du cinéma révolutionnaire, ce film donne à voir la lutte des noirs-américains aux Etats-Unis. Sous le titre de la chanson qui l’inspire, Now ! est réalisé à partir de photos tirées « de partout » et de films d’archives. N’ayant à sa disposition que très peu de films, Alvarez travaille des images issues de magazines dans la grande lignée des photos-montages. En août 1965, les émeutes de Watts, un ghetto de Los Angeles, représentent un apogée de la violence raciale. Alvarez avait pu constater l’effroyable injustice qui régnait aux Etats-Unis où il a passé une partie de sa jeunesse. Ce film appartient à une oeuvre, réalisée au Vietnam, au Laos, au Pérou, au Chili, dans laquelle s’exprime une vision internationaliste de la lutte, et l’utilisation du cinéma comme le moyen d’éveiller les consciences.
Fragments de Rêves de Bahïa Bencheikh El Fegoun
Algérie / 2017 / 1h15
Synopsis : Le film propose un croisement d’entretiens avec des acteurs de la société civile algérienne et des images d’archives ayant circulées sur les réseaux sociaux autour des mouvements sociaux de contestation depuis 2011 en Algérie. Des témoignages exclusifs exprimant un puissant désir de liberté, de dialogue et de paix. La projection de ce film aux Rencontres cinématographiques de Bejaïa a été interdite par le ministère de la Culture algérien, en septembre 2018.
Jeudi 12 novembre – 9h30 à La Baleine*, 20h30 au Vidéodrome 2**
Your Father Was Born 100 Years Old, and So Was the Nakba de Razan Al Salah
USA, Liban, Palestine / 2017 / 7 min / Vidéo
Synopsis : Oum Amin, une grand-mère palestinienne, retourne à Haïfa, sa ville natale, grâce à Google Maps Street View, la seule manière qu’elle a de revoir la Palestine.
Recollection de Kamal Aljafari
Palestine, Allemagne / 2016 / 1h10 / Expérimental
Synopsis : Un grand nombre de fictions ont été tournées dans la ville de Jaffa par des Israéliens et des Américains au cours des années 1960 à 1990 sans que les Palestiniens n’aient de rôle dans ces films. Kamal Aljafari fait le constat de cet effacement ; il utilise le cinéma comme un acte ultime de résistance et l’archive comme un médium militant. Son film mêle l’expérimental, le documentaire et la fiction. Il ne tourne aucune image mais détourne des images fictionnelles, produites par d’autres, pour se les réapproprier et pour redonner une place, une visibilité, aux Palestiniens.
Jeudi 17 décembre – 9h30 à La Baleine*, 20h30 au Vidéodrome 2**
Film de l’atelier programmateur
Au cours de chaque cycle des Écrans, la programmation d’une des séances est confiée à un groupe. De la sélection à la projection du film, les participants endossent le rôle de programmateurs, ils choisissent le film du mois, le présentent et animent les débats avec le public.
Voici les films qui seront proposés dans l’atelier :
Fragments d’une révolution de Anonyme
Delphine et Carole, Insoumuses de Callisto McNulty
Amussu de Nadir Bouhmouch
La République Marseille : Les Quais de Denis Gheerbrant
L’heure de la libération a sonné de Heiny Srour
La Guerre des centimes de Nader Samir Ayache
*Séance réservée aux publics scolaires et groupes (réservation : mediation@aflam.fr)
**Séances ouvertes à tous, gratuites ou prix libre