Rencontre avec le réalisateur Malek Bensmaïl
Modérée par Olivier Barlet, responsable éditorial cinéma à Africultures
Malek Bensmaïl est né à Constantine en 1966. Dans les années 1980, il a donc l’âge de fréquenter la cinémathèque d’Alger ou de Constantine, quand les plus grandes figures du cinéma international viennent y présenter leurs films ; il profite aussi de l’effervescence intellectuelle des nombreux clubs dispersés à travers le pays où se réunissent à l’époque les passionnés du cinéma. Il quitte l’Algérie pour se former au cinéma, à Paris puis à Leningrad où il aborde la mise en scène avec Alexandre Sokourov, ce qui dit-il l’a orienté vers le cinéma documentaire.
Lors de la guerre civile qui déchire l’Algérie des années 1990, il sent l’urgence de filmer, analyser, témoigner. Il prend aussi conscience de l’amnésie qui entoure les années de la guerre d’indépendance, des blessures qu’elle a laissées et qui ressurgissent à tout moment. Il décide de ce qui sera sa manière d’agir politiquement, en cinéma.
Après un premier essai documentaire Territoires (1996), où il s’interroge sur les origines de la violence « archaïques » en son pays et ses manifestations nouvelles dans l’ « hypermodernité » occidentale, ou Demokratia (2001), une fable sur la dictature, il choisit de documenter et analyser les événements politiques de son pays : ceux de la décennie sanglante qui mettent l’Algérie au centre des écrans de télévision du monde entier (Boudiaf, un espoir assassiné, 1993 ; Algéries, 2003) ou bien la mascarade des élections présidentielles (Le Grand jeu, 2005). Une autre partie de sa filmographie (Aliénation, 2004 ; La Chine est encore loin, 2008) développe de manière plus personnelle sa vision de l’identité et de l’appartenance en Algérie, un pays affecté par ses blessures et les sursauts qui ne cessent d’accabler son peuple, le réduisant au silence depuis la colonisation et la guerre de libération, et brisant toute tentative d’accéder à la démocratie.
Parlant de Contre-pouvoirs (2015), huis clos qui questionne la liberté d’expression de la presse algérienne pendant les élections présidentielles, Malek Bensmaïl dépeint ainsi l’intention générale de sa démarche documentaire : “Il ne suffit pas de montrer les violences, ni de raconter l’actualité mais il y a un devoir à continuer d’enregistrer les évolutions, les réflexions, les batailles, d’enregistrer une démocratie qui peine à naître mais qui se construit malgré tout, jour après jour”.
Organisée en partenariat avec Institut de Recherches et d’Etudes sur les Mondes Arabes et Musulmans (IREMAM), l’EHESS et l’Université Aix-Marseille – AMU